Aujourd’hui vendredi 16 décembre, il est déjà l’heure de quitter nos amies audenciennes. Encore du bus et encore des paysages montagneux et désertiques merveilleux où nous croisons des lamas, des alpagas et des vigognes par milliers.
Vers 14h nous arrivons à Puno, capitale du folklore andin, située sur les berges du lac le plus haut du monde, à 3 810m : le lac Titicaca. La vue sur l’altiplano y est magnifique. Le bleu du lac s’étend à perte de vue (sur plus de 180km de long et 20km de large).
Et c’est là que Nicolas et Hélène quittent Adélaïde qui ira visiter Puno seul tandis que les deux autres s’en vont vivre chez une famille Uros, sur une île flottante. Adé n’aimant pas le poisson (nourriture principale des Uros avec la Quinoa) et préférant garder la somme assez élevée demandée par la famille pour d’autres excurssions. Arrivée à l’auberge où Nico et Hélène la rejoindront le lendemain soir, elle rencontre pas mal de monde et réserve son excursion sur des îles du lac pour le lendemain, avant de visiter le centre-ville, sa cathédrale et ses petits étals. Pendant ce temps, Nico et Hélène sont emmenés par Abraham vers une petite barque où Victor, le chef de famille, les attend. Pour Nico et Hélène, nous parlerons désormais à la 1ère personne du pluriel pour plus de commodité. Nous montons donc dans cette petite barque qui nous transporte instantanément dans un autre temps. Lentement poussés par une tige d’eucalyptus qui s’enfonce dans les eaux sombre du Titicaca, nous avançons à travers les roseaux et les oiseaux. Victor nous parle avec amour de ces îles que nous nous apprêtons à rejoindre d’ici 35-45 min de navigation paisible sur le lac le plus haut du monde. Notre impression est alors indescriptible, nous nous sentons comme dans l’émission « En terre inconnue », à la découverte de la tribu Uros, qui parle Aymara et est le peuple de l’éphémère : leur bateau en roseau dure entre un et deux ans, leurs maisons de roseaux entre 2 et 3 mois et leur île en elle-même, faite d’une couche de 3 mètres de roseaux flottant sur 25m d’eau, doit être renouvelée tous les 25 ans environ.
… Les Uros sont constitués de 75 îles qui représentent 75 familles agrandies. Car sur chaque île vivent une famille et les familles de leurs enfants. Un couple de grands parents et 3 frères mariés par exemple. Ce sont les filles qui doivent allées vivre sur l’île de leur mari. En tout, ils sont à peu près 2000 Uros, dont les ancêtres ont plus de 1000 ans. Avant la période Inca, les Uros ne vivaient que sur de grandes embarcations en roseaux. Ce n’est qu’après qu’ils ont commencés à construire des îles, se déplaçant malgré tout au gré des tempêtes. Mais il leur faut toujours revenir à leur emplacement de départ une fois les vents calmés, pour ne pas empiéter sur le territoire des autres. Des sortes d’ancres aident à stabiliser un peu l’île, mais bien souvent il faut la repousser à l’aide des bateaux.
Nous approchons avec stupéfaction de ces constructions sans âge hors du commun. Nos premiers pas paraissent être effectués sur des matelas d’eau. Nos pieds s’enfoncent sur ce lit de roseau flottant. L’impression est agréable. La décoration entièrement faite de roseaux séchés, magique. Cristina nous accueille de son plus grand sourire. Vêtue d’une longue jupe épaisse rose fluo, d’un petit cardigan vert et d’une coiffe sous son chapeau de roseau, elle nous emmène vers notre chambre : une petite maison en roseau (du sol au plafond comme toutes les constructions ici) avec un petit lit en roseau, recouverte de plusieurs couvertures épaisses en lama. Sur les murs sont tendus des tapis péruviens aux couleurs vives. Cela nous fait penser à la maison de paille dans le conte des 3 petits cochons. Nous suivons Cristina au comedor où elle veut nous raconter l’histoire de notre venue. Si nous sommes là aujourd’hui c’est que nous avons trouvé ses références dans notre Lonely Planet. Et si nous avons pu trouvé ses références dans notre bible, c’est grâce à un Français qui par hasard, il y a 6 ans, s’est arrêté sur leur île et leur a demandé l’hébergement. Il étudiait le tourisme équitable et leur a émis l’idée d’ouvrir leur demeure aux touristes pour faire partager leur culture et augmenter leur maigre revenus, afin d’envoyer leur fille et leur fils à l’école. Petit à petit, loin des tours opérateurs, par le bouche à oreille, l’adresse de Cristina s’est transmise à des voyageurs privilégiés et au grand cœur voulant partager le quotidien de cette tribu hors du commun. Ecoutant avec attention les conseils touristiques des voyageurs (« sus amigos » comme elle dit) qui passaient parfois, Cristina a construit d’autres maisonnées pour sus amigos et a appris à cuisiner pour leur éviter la turista. Elle a mis en place des toilettes biodégradables et a acheté des couverts. Depuis 5 mois, des panneaux solaires fournissent un minimum d’électricité à la nuit tombée… mais pas de chauffage bien évidemment. Il est 17h30, le soleil se couche et la température s’approche du 0. Nous avons très froids.
Mais Cristina et Victor sont au petit soin, nous mâchons des feuilles de coca (très bon contre le mal de l’altitude –sorrocho- et pour anesthésier la bouche mais assez peu goûtu en bouche) emmitouflés dans des couvertures épaisses. Le maté de coca nous réchauffe, et ce n’est rien comparé au festin que nous sert Cristina : de la truite grillée au romarin accompagné de Quinoa assaisonné ! Notre repas le plus complet et sain depuis 3 semaines ! Et ce n’est pas tout ! En dessert arrivent des beignets de mangue et sa sauce mentholée !
Nous sommes au Paradis ici ! En sortant nous saluons les flamants roses apprivoisés qui se baignent dans un trou au milieu de l’île puis allons rêver dans notre hutte balancée par le vent et la pluie : demain nous irons pêcher !